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C’est le genre d’histoire qui se fraie un chemin dans votre esprit et vous obsède, même quand vous êtes éveillé. Et je le suis encore, à trois heures du matin.
Je séjourne à l’Hotel du Vin Edinburgh, et le sinistre passé de l’établissement trouble mon sommeil. Une peur bizarre et persistante m’habite. J’entends le hurlement du vent, même si le temps a été calme toute la soirée. Je sens une fraîcheur s’insinuer entre mes draps. Je perçois le plic ploc discret d’un robinet qui a commencé à couler à ce moment précis.
J’ai commencé à trembler. C’est parce que plus tôt dans la soirée, j’ai découvert que cet hôtel construit au XVIIIe siècle a déjà servi d’asile, et que certains voyageurs ont déjà vu dans ses murs les ombres de fantômes mécontents. Étaient-ce les esprits des gens qui l’habitaient autrefois?
Soyons clairs : je ne crois pas vraiment aux fantômes. Mais je n’ose pas dire qu’ils n’existent pas, au cas où je serais dans l’erreur et qu’ils viendraient me hanter par vengeance ! C’est pourquoi, en cette Année de l’histoire, du patrimoine et de l’archéologie en Écosse, je suis venue au pays des monstres marins, des poltergeists de cimetière et des fantômes qui hantent les souterrains. Il fallait que j’essaie de rencontrer l’un de ces terrifiants spectres.
Le Fantôme du passage de Mary King
Sous le très animé Royal Mile, l’avenue principale d’Édimbourg, existent de sombres couloirs où l’on raconte à voix basse des histoires de fantômes. C’est le cas du passage de Mary King : autrefois pleine de vie et ouverte sur le ciel, cette ruelle est à présent enterrée sous la vieille ville et complètement désertée… sauf par quelques esprits vagabonds.
En marchant dans le réseau souterrain de ruelles et de petits logements, on peut presque sentir, enfermés dans les murs, les secrets macabres des occupants d’autrefois. Car en 1645, une épidémie de peste bubonique éclatait ici, ravageant les demeures surpeuplées. Et une fois l’épidémie passée, on dit que les âmes des victimes seraient revenues dans leurs maisons.
Nous entrons dans une grande pièce ayant appartenu à une famille prospère du XVIIe siècle. C’est ici que vivait Annie… et qu’elle vit encore, selon la légende.
L’histoire raconte qu’en 1982, une médium japonaise en visite perçut une présence triste dans la pièce. Puis, au moment où elle allait sortir, elle sentit qu’on tirait sur sa manche. Se retournant brusquement, la médium vit une petite fille habillée de guenilles qui pleurait dans un coin. Cette dernière dit s’appeler Annie et raconta que ses parents l’avaient abandonnée plus de trois siècles auparavant, après qu’elle eut attrapé la peste. Elle pleurait parce qu’elle se sentait seule et avait perdu sa poupée préférée.
La médium remonta alors en vitesse vers le Royal Mile et lui acheta la première poupée qui lui tomba sous la main : une Barbie vêtue de tartan. Elle redescendit ensuite la porter dans la chambre et perçut alors une vague de bonheur se répandre dans la pièce. Depuis, les visiteurs laissent des poupées et des animaux en peluche à l’intention d’Annie.
On dit que si nous restons immobiles, nous pouvons parfois sentir un léger tiraillement sur nos vêtements et la main d’une petite fille agripper la nôtre. Je tends donc la main, prête à recueillir de petites menottes fantômes. C’est alors que je sens comme un chuchotement dans mon oreille, venu de derrière. Je me retourne pour foudroyer du regard l’intrus qui détruisait ainsi mon recueillement, sauf que… il n’y a personne.
Le Guetteur
Les voûtes de la rue Blair se trouvent sous le sol de la vieille ville. Autrefois occupées par des ateliers et des entrepôts de commerçants, ces pièces construites au XVIIIe siècle ont ensuite été le repaire des gens de la mauvaise société d’Édimbourg: meurtriers, kidnappeurs et tortionnaires dont les spectres agités s’incrustent toujours dans ces espaces restreints.
Cet endroit donne vraiment l’impression d’être hanté. Chacune des pièces est délimitée par des murs de pierre humides, et si l’on fixe la profonde noirceur assez longtemps, l’imagination fait naître des formes spectrales dans l’air soudainement devenu froid. Je ne suis pas la seule à sentir ce froid, pas vrai ?
Soudainement, des bruits de pas sinistres me font sursauter. «C’est ainsi que vous entendrez le Guetteur arriver», nous avertit notre guide Jérémie en marchant fort sur le sol pour imiter le pas du fantôme auquel on a donné ce nom, et dont on dit qu’il se promène de façon menaçante en fixant les visiteurs.
«C’est son premier avertissement», nous dit-il avant de s’en aller.
Nous le suivons dans une petite pièce aux murs blancs. «C’est ici que le Guetteur attaque ses victimes», nous dit-il à voix basse. « Ça commencera lorsque vous sentirez un souf e froid sur la nuque. Le sentez-vous?»
Oui, je le sens vraiment. Ça pourrait être les 27 autres personnes qui se tiennent derrière moi, mais je suis presque sûre que c’est le Guetteur.
«Ensuite, la flamme de la bougie vacillera.» Ce qu’elle fait, avant de s’éteindre complètement sous le souffle d’une brise soudaine.
«Puis, le souffle froid deviendra plus fort et se transformera en paroles: S-o-o-o-r-t-e-e-e-z. S-o-o-o-r-t- e-e-e-z. SORTEZ!»
Jérémie laisse échapper un hurlement que répercutent les murs de pierre et qui fait battre mon cœur à toute vitesse dans ma poitrine. Le peu de courage qu’il me restait encore se désintègre à ce moment, et je sors des voûtes en courant.
Le poltergeist de Mackenzie
Je marche rapidement le long des rues vers mon hôtel. Drôle de ville qu’Édimbourg, tout de même, où je cherche refuge dans un ancien asile. Derrière l’Hotel du Vin, je remarque un cimetière dans l’ombre, qui semble parcouru par la brume malgré la soirée sans nuages. Je m’approche lentement jusqu’à pouvoir lire le nom qui surmonte les portes en fer forgé : Greyfriars. Un frisson me parcourt le dos : je suis aux portes de l’un des endroits les plus hantés sur Terre.
J’entre tout de même en tremblant. Un épais silence enveloppe le moindre recoin du cimetière, m’empêchant d’entendre les bruits d’un groupe agité qui se trouve tout près. Des arbres fantomatiques émergent du sol, tandis que les tombes sont envahies par des herbes longues et des feuillages.
Mon regard finit par tomber sur le mausolée noir qui domine le fond du cimetière: la demeure du poltergeist de Mackenzie.
George Mackenzie, surnommé Bloody Mackenzie, fut un lord avocat qui, au XVIIe siècle, causa la mort de 18 000 membres du mouvement religieux des Covenantaires. À sa mort, en 1691, il fut enterré dans ce mausolée noir où il reposait en paix… jusqu’à récemment.
À la fin des années 1990, un sans-abri entra par effraction dans le mausolée, dérangeant apparemment le poltergeist de Mackenzie. Depuis, plusieurs visiteurs ont raconté avoir vu des choses étranges au cimetière: apparitions, température qui chute, bruits terrifiants et même des attaques physiques.
Les jambes molles, je m’approche du mausolée, progressant doucement de manière à ne pas déranger le poltergeist de Mackenzie. La porte du mausolée est barrée d’un cadenas. Je jette un coup d’œil à l’intérieur par l’une des deux petites fenêtres, et il me semble que la noirceur épaisse s’écoule par les ouvertures et veut m’étouffer. Je peux presque entendre, flottant dans l’air, les cris que les victimes de Mackenzie ont dû lancer sous la torture.
Le froid commence à me chatouiller les orteils et à faire frémir tout mon corps. Mon regard s’arrête sur les yeux d’un crâne sculpté dans la pierre noire. Soudain, un éclat de lumière illumine le mausolée et une armée d’ombres se rue vers moi. Je recule en sautant, un cri m’échappe. Puis je trébuche sur quelque chose.
«Désolée», s’excuse une femme qui se trouvait apparemment derrière moi tout ce temps, silencieuse, et c’est ce moment qu’elle a choisi pour faire jaillir la lumière de son cellulaire dans le mausolée.
J’essaie de sourire, mais mes lèvres tremblantes ne veulent pas coopérer. Alors je me dirige vers la sortie du cimetière. J’ai eu assez peur pour la journée.
Plus tard cette nuit-là, à l’hôtel, j’essaie toujours d’ignorer le hurlement du vent, le plic ploc du robinet et le froid entre mes draps. Il est 4 h 30 du matin. Édimbourg est arrivée à me faire croire aux fantômes.
Chasser les frissons en Écosse
Château d’Édimbourg:
cette forteresse historique a abrité de nombreux fantômes au l des siècles, d’un mystérieux cornemuseur à un joueur de tambour sans tête. edinburghcastle.gov.uk
Mercat Tours:
des conteurs vraiment terri ants vous font découvrir le côté sombre d’Édimbourg. mercattours.com
The Real Mary King’s Close :
cette visite historique vous entraînera sous la vieille ville pour révéler l’authentique et terri ante histoire de ses passages cachés. realmarykingsclose.com
Loch Ness:
joignez-vous à la Monster Patrol pour une croisière sur le pittoresque Loch Ness et n’oubliez pas d’ouvrir grand les yeux : vous apercevrez peut-être le célèbre monstre marin. jacobite.co.uk
Où séjourner
Hotel du Vin Edinburgh:
le personnel amical de cet hôtel chic vous fera oublier son sinistre passé d’asile.
Monachyle Mhor:
situé au d’un loch et au pied d’une montagne, cet hôtel-boutique n’est pas hanté, mais son propriétaire et ses employés affables vous régaleront avec des histoires de fantômes qui hantent la région.