Deuxième plus grande ville de l’Union européenne après Londres, la capitale espagnole est constituée d’une mosaïque de quartiers qu’on aime découvrir à pied. Par où commencer? Mais… par nos préférés, tout simplement. Bonne visite à Madrid – surtout si c’est en compagnie de nos guides madrilènes de prédilection, Ángel González et Sandra López Pérez.
Salesas et la coolitude chic
Situé au nord du centre de Madrid, ce secteur jadis bourgeois donne aujourd’hui dans la coolitude chic. Arpenter ses rues tranquilles, bordées de résidences aux balcons fleuris, c’est prendre le pouls d’une Madrid élégante, plus résidentielle que commerciale. À noter : il s’y tient tous les mois ou presque un festival de rue au cours duquel des artisans présentent leurs créations.
De bonnes adresses à découvrir à Salesas pendant son voyage à Madrid?
- La Duquesita, une pâtisserie et une vénérable institution locale. On y va pour siroter un café dans un cadre Belle Époque.
- À côté, la maison Olivier Bernoux exprime toute la modernité madrilène à travers une tradition locale revisitée : celle de l’éventail. Saviez-vous qu’autrefois, cet accessoire de séduction avait son propre langage codé? Le poser sur la joue signifiait « tu me plais bien »; sur l’épaule, « c’est non! ».
- Il faut aussi jeter un coup d’œil à la galerie d’art La Caja. Sa particularité? « Il s’agit d’un bel appartement, comme tous ceux du quartier, explique le galeriste et architecte Javier Guijarro. Il est donc aisé pour les visiteurs de s’imaginer ces œuvres chez eux ! » Chose certaine, on s’y familiarise avec le travail de peintres, sculpteurs et photographes contemporains espagnols, tels Luis Feo et Cristobal Ochoa, ainsi qu’étrangers.
Chueca, là où on vit la nuit…
Voisin de Salesas, Chueca en est ô combien distinct! Portant le nom d’un compositeur du 19e siècle reconnu pour ses zarzuelas (opérettes, un genre populaire à Madrid, l’été), ce quartier était alors celui de la classe moyenne supérieure. Graduellement, il connaît un déclin, si bien que dans les années 1970, on ne s’y aventure plus. Une renaissance s’amorce dans les années 1980 et plus encore la décennie suivante sous l’impulsion de la communauté gaie, qui s’y installe. Cafés, boutiques, bars et restaurants y foisonnent et depuis, il est réputé pour sa vie nocturne endiablée. La calle Hortaleza le traverse et s’avère un bon point de départ pour le découvrir.
Le Mercado de San Antón est un marché reconverti en foire alimentaire, concurrence des grandes surfaces oblige, mais demeure authentique. On aime particulièrement sa terrasse fleurie sur le toit. Chueca est aussi le fief des grandes tables. Comme celle du Basque Diego Guerrero, disciple du compatriote Martín Berasategui, aux commandes du restaurant DSTAgE (deux étoiles Michelin). Rue Pelayo, on fouine chez La Oficial, qui représente des céramistes extraordinaires. Juste pour voir du beau…
Malasaña, hipsters compris
Il était une fois la fille d’un boulanger français, Manuela Malesange. Couturière de son état, elle participa au soulèvement du 2 mai 1806 contre les Français et fut exécutée au motif qu’elle portait une arme sur elle. Ses ciseaux! De fil en aiguille se broda toute une légende urbaine autour de l’adolescente qui s’était sacrifiée pour la cause. Et c’est ainsi que ce secteur, jadis appelé Maravillas, a pris le nom de Malasaña pour l’honorer.
Avis aux fans du cinéaste (un temps) iconoclaste Pedro Almodóvar (Femmes au bord de la crise de nerfs, Parle avec elle), ce quartier fut l’épicentre de la célèbre Movida. Il s’agit d’un mouvement artistique d’une grande liberté, qui coïncide avec le retour de la démocratie au pays. Par ailleurs, Alaska, chanteuse de l’époque, y vit encore. Après un épisode moins glorieux en tant que fief des toxicomanes, le voilà qui renaît sous des couleurs hipsters, cafés véganes et friperies à la clé. Une bonne rue à arpenter? La Corredera Alto de San Pablo.
Nos adresses top dans le quartier Malasaña à Madrid :
- Du côté de la Plaza Juan Pujol, le restaurant Ojalá, pour sa… « plage » à la cave
- Le café rétro La Lolina (oh, le douillet cocon!)
- La galerie d’art pop La Fiambrera, (absolument, c’est une vraie caverne d’Ali Baba)
- L’Antigua Casa Crespo, fabricant d’espadrilles depuis 1863 (en soi, un voyage dans le temps).
Barrio de las Letras, l’épicentre culturel
Dès la seconde moitié du 16e siècle, le théâtre est de première importance pour les Madrilènes de toutes les classes sociales. Les pièces qu’on donne au Teatro español sont littéralement l’équivalent des séries Netflix qu’on apprécie aujourd’hui! On veut vivre dans ce quartier. C’est alors que s’y établissent acteurs, dramaturges, costumiers, poètes et écrivains, dont le père de Don Quichotte, Miguel de Cervantes. Il a vécu dans une maison qui correspond aujourd’hui au 17 calle Huertas. Certains de ses vers sont inscrits dans la rue, à proximité.
Plaza Santa Ana s’élève de plus une statue à la mémoire de Federico Garcia Lorca, qui vécut longtemps à Madrid. Éminemment touristique (Time Out l’a inscrit à son palmarès 2022 des 51 quartiers à visiter de par le vaste monde), il n’en est pas moins irrésistible!
On en retient le restaurant d’époque Casa Alberto, où siffler un petit vermut au bar à l’heure des tapas; Triciclo, une table recommandée par Michelin; le Mercado de Las Ranas, marché mensuel qui anime ses rues (on confirme les dates sur place) et l’atmosphère conviviale, le soir venu, de la fameuse Plaza Santa Ana. En prime, les trois grands musées de la capitale – Prado, Reina Sofia et Thyssen-Bornemisza – s’en trouvent à moins de 15 minutes à pied!